Qu'est ce qu'un talibé ?
Au Sénégal, un « talibé » est un enfant confié à un marabout, qui a la responsabilité de lui transmettre l’éducation coranique (lui apprendre à lire et écrire l’arabe, à réciter le coran et à en comprendre le sens). D’après cette tradition religieuse, l’enfant confié rentre chez lui chaque soir pour dormir, ne quitte pas son village et se rend chez son marabout, comme s’il se rendait à l’école. Dans les faits, une dérive de cette tradition existe depuis plusieurs années et fait beaucoup de mal sur son passage : les enfants confiés sont emmenés loin des villages pour rejoindre un daara en ville, à Dakar, à Saint-Louis, etc. Nous les appellerons les enfants "faux-talibés" et leurs maitres "faux-marabouts".
Le « daara » devient, en quelque sorte, leur nouvelle maison. C’est là qu’ils vivent, dans des conditions difficiles, et qu’ils sont censés apprendre le coran. Chaque daara appartient à un marabout et porte son nom. Souvent, ils ne rentrent jamais chez eux.
En ville, les enfants sont réduits à la mendicité par leur faux-marabout : chaque jour, ils doivent ramener une certaine somme d’argent ou quantité de riz/sucre à leur marabout. S’ils ne récoltent pas le montant souhaité ou s’ils n’apprennent pas bien leurs leçons coraniques, ils reçoivent des punitions et sont souvent maltraités (coups de fouet, attachés, séquestrés) par le faux-marabout ou ses sous-fifres. Souvent, les faux-marabouts refusent que les enfants aillent se divertir dans les associations, car, selon eux, ces moments de joie détournent leur attention et leur donnent envie de fuguer.
Le centre d'accueil et d'insertion
de Saint-Louis
Le centre a pour mission d'accueillir les enfants faux-talibés. Sur place, ils peuvent prendre une douche, participer à des activités de groupe (sportives, jeux de ballon, bricolage, dessin, coloriage, etc.). Chaque vendredi, un goûter est servi. Un jeudi sur deux, l'équipe prépare des crêpes et les offre aux enfants. Chaque jour, les membres de l'équipe sont présents et prêts à écouter les enfants. Une salle d'écoute a d'ailleurs été mise en place pour plus d'intimité.
Trois matinées par semaine, deux éducateurs, parfois accompagnés de l'infirmière, se rendent dans les daaras, sur les lieux de vie des enfants. Ils peuvent faire plusieurs kilomètres à pieds pour atteindre les daaras les plus éloignés. Le but est de proposer des soins aux enfants qui en ont besoin et qui n'ont pas la possibilité de venir se soigner au centre.
Chaque goûter du vendredi voit affluer près de 600 enfants, âgés de 4 à 16 ans.
L'équipe se compose d'un gérant, d'une infirmière, de trois éducateurs, d'une femme de ménage et d'un gardien.
Ce n'est pas tout ...
En parallèle de notre travail au centre d'accueil et d'insertion des enfants mendiants à Saint-Louis, nous mettons notre énergie à élaborer un plaidoyer et à récolter des témoignages. Nous travaillons en étroite collaboration avec le médiateur de la République. Nous pointons du doigt les situations de maltraitance dont nous sommes témoins et agissons pour que les choses changent. Mais le travail est de longue haleine...
En XXX, nous avons publié un livre qui reprend des photos, des témoignages et des citations du Coran. Son but est de dénoncer le quotidien de milliers d'enfants sénégalais sous la houlette de marabouts mal intentionnés et maltraitants. N'hésitez pas à nous contacter pour en acheter un exemplaire.
Extrait d'un témoignage du livre :
"Il est impossible de pouvoir comprendre ce que l'on a vécu. Néné nous avait pourtant expliqué les conditions dans lesquelles vivaient les enfants faux-talibés, mais ce n'était rien à côté de ce qu'on a pu constater de nos propres yeux : terre battue au sol, pas d'arrivée d'eau, excréments débordant dans la pièce de vie, car fausse septique non-vidée, 9 m² de "chambre" ou pièce insalubre pour 30 enfants dans laquelle on retrouve lames de rasoir, paillasses en lambeaux, cafards, vêtements souillés, etc. Nous nous arrêtons là, car il est impossible d'énumérer tout ce qu'on a vu ! Le pire dans tout cela est l'état de santé des enfants faux-talibés. Des plaies, des coupures, des brûlures, la gale étaient observées principalement sur leurs membres, leur siège et leur tête. Lorsque nous arrivions dans les daaras, notre principale préoccupation était le bien-être des enfants faux-talibés. Sachant la maltraitante infligée par des faux-marabouts aux enfants, nous devions prendre sur nous afin d'accomplir au mieux notre travail. Ce qui nous a interpellé chez la plupart des enfants mendiants, c'est leur visage inexpressif ! Le seul objectif pour les enfants faux-talibés était la survie." Françoise, Charlotte, Valentine.